Crowdfunding : financer un complot ou faire du prosélytisme nauséabond ?

Les tribunes
Typography
  • Smaller Small Medium Big Bigger
  • Default Helvetica Segoe Georgia Times

Fin 2020, je lançais un crowdfunding sur la plateforme KissKissBankBank pour financer mon documentaire « Ceci n’est pas un complot ». Lorsque les contributions ont atteint un montant significatif, le journal Le Soir s’est fendu d’une pleine page titrée « Sur les sites de crowdfunding, le complot ça rapporte »[1].

Le titre de l’article m’a semblé trompeur pour les contributeurs : « le complot, ça rapporte ». D’une part, je ne préparais pas un complot, mais un film. D’autre part le crowdfunding avait généré 74 000 euros net. Cette somme représente 37% du budget moyen d’un documentaire en Fédération Wallonie Bruxelles. Le film ne m’a rien rapporté financièrement.

Dans le livre « Chronique d’un retour de flamme »[2], je reviens en détail sur cet épisode, et d’autres qui ont jalonné la sortie de « Ceci n’est pas un complot ».

Il y a quelques jours, j’ai lancé le crowdfunding de mon deuxième documentaire sur la crise Covid, intitulé     « Ceci n’est plus une crise sanitaire »[3]. J’avais souhaité travailler à nouveau avec KissKissBankBank, qui avait réalisé avec mon précédent film sa plus grosse collecte en Belgique. La plateforme a pourtant décidé ne pas héberger mon nouveau projet, au motif que le sujet « déjà touchy de la première campagne » avait gagné en ampleur avec les polémiques concernant le financement de « fake news ». J’ai donc décidé de créer avec une agence spécialisée ma propre plateforme. Le résultat est plutôt encourageant puisqu’un premier palier de 50 000 euros a été dépassé.

Je devrais me réjouir de ce succès, d’autant que les contributions continuent d’arriver. Mais toute médaille a son revers. Si le projet est globalement bien accueilli, il a aussi engendré dans mon « premier cercle » des réactions dont je n’avais pas imaginé la violence.

Une des explications possibles est que la campagne vaccinale a divisé la société en deux camps qui se regardent en chiens de faïence : les « vaccinés » et les « antivax ». Cette dichotomie est évidemment réductrice, la question n’est pas là. La stigmatisation des « antivax » - ces irresponsables, ces égoïstes, ces imbéciles - est largement encouragée par certains politiques, experts et éditorialistes de sorte que la parole se libère au sein même des familles et des cercles d’amis.

Ainsi on accuse mon nouveau mon teaser vidéo[4] d’encourager le populisme ou de faire le jeu de l’extrême droite.... Un ami ( ?) m’écrira même : « je trouve ta collecte de fonds profondément malsaine et ton prosélytisme nauséabond ».

Je tiens bon face aux critiques, parce que je veux réaliser un film nécessaire, et parce que le financement participatif est la seule manière de produire un documentaire sans l’appui des chaînes de télévision et de possibles subventions. Les journalistes et documentaristes « dissidents » s’en remettent entièrement à leur audience pour financer leur travail. Les lecteurs de BAM ! le savent mieux que quiconque.

Par Bernard Crutzen, réalisateur indépendant


Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que la responsabilité de l’auteur et ne représentent pas nécessairement celle de BAM !

[1]https://www.lesoir.be/338647/article/2020-11-18/sur-les-sites-de-crowdfunding-le-complot-ca-rapporte
[2]Le livre n’est pas disponible dans le commerce, il est réservé aux contributeurs du nouveau crowdfunding.
[3]https://cnpcs.be/
[4]https://youtu.be/t8pB_-UbDho

Categories: Bernard Crutzen