Scientisme covidien, marchepied totalitaire.

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Les appels à la légitimité scientifique ont souvent fondé des politiques qui ne relevaient dès lors plus de politique. L’absence de choix du fait d’une supposée vérité supérieure, théologique ou scientifique, signe en effet l’arrêt de ce qui relève du politique, c’est-à-dire de la discussion publique sur la manière de vivre en société.

Du marketing pharmaceutique à la gestion de l’épidémie covidienne, la mise en avant des blouses blanches vise à impressionner et à éviter le débat politique en laissant croire à une forme de vérité scientifique supérieure. C’est sans doute recevable là où, par exemple, les lois de la gravité ou de l’électromagnétisme s’imposent de par leur vérité expérimentale face aux croyances, aussi politisées soient-elles, mais même en ce cas il n’est généralement pas question d’enfermer les religieux ni les croyants en la terre plate sous prétexte qu’ils refusent la réalité scientifique.

Incarcérer des populations entières sous prétexte de vérité covidienne, par contre, semble devenu parfaitement acceptable, alors même que la «science» supposée justifier de telles mesures relève surtout du scientisme, c’est-à-dire le dogmatisme déguisé en théorie scientifique.

Comment nous en sommes arrivés là sera sans doute le sujet de nombreuses études sociales et anthropologiques dans les années à venir, à condition bien sûr que la dictature sanitaire ne s’impose pas définitivement.

Le marigot de la recherche scientifique.

La science asservie à des motivations de pouvoir n’a rien de nouveau. C’est vrai en général, et c’est particulièrement vrai là où existent des liens forts entre l’argent, la science et les institutions de pouvoir. La corruption au sein des «sciences de la vie» est directement liée aux immenses bénéfices que les sociétés, Big Pharma en tête, peuvent tirer de nouvelles molécules vendues fort cher, quitte à réaliser toutes sortes de fraudes en matière de recherche et de communication.

En 2015, l’éditeur de The Lancet Richard Horton sonnait l’alarme sur le manque de rigueur et les biais d’intérêts qui pourrissent la science, notamment médicale, au point d’écrire que la moitié des études publiées par des journaux comme le sien ne valait sans doute rien (1). Un avertissement loin d’être unique: en 2005 déjà, le désormais fameux épidémiologiste John Ioannidis publiait un article intitulé «Pourquoi la plupart des études publiées sont fausses» (2).

En 2014 il publiait un autre article, intitulé «Comment rendre la recherche publiée plus vraie», où il proposait quelques mesures visant à rétablir la crédibilité de cette recherche:

  1. 85% des efforts de recherche sont gaspillés du fait de la
    haute proportion d’études fausses ou aux résultats exagérés.
  2. Un ensemble de changements opératoires et culturels:
    collaboration à grande échelle, tests de réplication
    systématiques, meilleures méthodes statistiques,
    standardisation des méthodes et analyses, etc…
  3. Plus grande rigueur dans la sélection des méthodes, avec
    examens approfondis et expérimentation.
  4. Prise en compte des motivations des participants, des
    promoteurs et des bénéficiaires des études.
  5. Modification du système de récompense en recherche
    scientifique.
    http://journals.plos.org/plosmedicine/article?
    id=10.1371/journal.pmed.1001747

La saga covidienne aura montré à quel point ces mesures n’auront pas été appliquées.
D’abord, du fait des études bidon visant à promouvoir des molécules chères en délégitimant des molécules connues et accessibles (3). Ensuite, par l’acceptation sans conditions d'études sur les vaccins publiées par les laboratoires eux-mêmes, faisant fi de toute une tradition d’essais et de vérifications au nom de «l’urgence» (4). Et enfin, l’inexistence d’études crédibles, voire d’études tout court, justifiant non seulement l’efficacité sanitaire des confinements et autres mesures punitives en tous genres, mais également analysant le rapport coût-bénéfice socio-économique de tout ce cirque.

Face au scientisme, la nécessité du débat scientifique.

Le politique, corrompu, inepte et asservi à toutes sortes d’intérêts particuliers, utilise la science pour sortir du politique, pour interdire tout débat car la science, nous dit-on, n’est pas une affaire d’opinion. Toute science indépendante qui s’avise de questionner cette science devenue « officielle » se voit étiquetée «complotiste» par les VRP de Big Pharma et les chiens de garde politico-médiatiques qui «informent» sur les plateaux télé, menant ainsi le public «BFM» à ne plus faire la différence entre la vraie science critique, objective et indépendante, et les extrémismes factuellement «complotistes» qui servent d’épouvantail: si vous ne croyez pas au masque, vous êtes complotiste et probablement fasciste et antisémite car les fachos ne croient pas au masque. Donc on préfère croire au masque.

Cette manipulation grossière n’est que cela: une manipulation grossière. En effet, la science est le plus souvent une affaire d’opinion et ses applications ne peuvent généralement exister en-dehors d’une contextualisation politique. «Science sans conscience n’est que ruine de l’âme», disait Rabelais. Le débat scientifique est au coeur même de la science, et l’absence de débat, voire son interdiction de fait, effraie les scientifiques honnêtes et les observateurs de la science. Fin 2020 le magazine Scientific American s’en inquiétait publiquement:

Scientific American est tout sauf un journal «complotiste». Il a
même un avis peu favorable envers les études menées par le Pr
Raoult, ce qui le classe a priori du côté de la science
«officielle». Et pourtant, il fustige le monopole des options
autoritaires et contraignantes, du type confinement, dans la
lutte contre le Sars-CoV-2. Il en appelle à l’écoute d’experts
reconnus, objectivement indépendants, qui proposent des pistes
alternatives plus efficaces et moins coûteuses:
https://www.scientificamerican.com/article/the-covid-science-wars1/

L’opposition des points de vue fut rendue apparente en octobre 2020 via les déclarations contraires des deux «camps» au sujet des mesures liberticides type confinement: d’un côté les signataires du «Memorandum John Snow» préconisant des mesures strictes à l’encontre de l’ensemble des populations (5), ce que la plupart d’entre nous subit en effet. De l’autre, la Déclaration de Great Barrington (6) préconisant, elle, une «protection focalisée» visant à protéger les gens à risque, en laissant un maximum de liberté aux autres afin d’éviter et la destruction socioéconomique, et un désastre sanitaire à moyen terme potentiellement plus grave que le Covid lui-même.

La faillite du tout répressif.

Six mois plus tard, il est devenu clair qu’hors certains cas spécifiques comme la Nouvelle-Zélande, une île avec une faible densité de population qui s’en est bien sortie avec des mesures très strictes, les délires confinatoires sont une catastrophe à tous points de vue. Mais c’était déjà clair depuis le début, dès mars 2020, où les premières évaluations du rapport coût-bénéfice des confinements questionnaient l’ineptie inhérente à vouloir lutter contre une maladie respiratoire en empêchant les gens de respirer.

Fin 2020 et début 2021, des scientifiques renommés tels Jean-François Toussaint et John Ioannidis produisaient des études qui auraient dû enterrer définitivement ce concept médiéval: «Mortalité Covid-19: une question de vulnérabilité au sein de Nations faisant face à de faibles marges d’adaptation» pour le premier (8), et pour le second on peut se référer à son séminaire à l’IHU de Marseille en février (9).

Plus récemment encore, la situation américaine a renforcé le retour de bâton anticonfinement via les exemples d’Etats ayant réouvert depuis début mars (Texas, Floride, Wisconsin) et ceux qui restent fermés: pas de liens entre dynamique épidémique et confinement ou absence de confinement, mais évidemment de grosses différences en matière socio-économique et popularité des gouverneurs (10). Pareillement en comparant les taux de mortalité de la France confinée et de la Suède non confinée: quasi identiques.

Aux origines du Mal.

Mais quelle science a bien pu accoucher de l’idée de confinement et de «distanciation sociale» à l’époque moderne? Le New York Times en retraçait la genèse dans un article d’avril 2020, intitulé «L’histoire non dite des origines de la distanciation sociale» (11). L’idée remonte à 2006 et aux deux médecins fédéraux Richard Hatchett et Carter Mecher, proches de l’administration G.W. Bush. A force de modélisations plus ou moins fumeuses, cette équipe parvient à faire imposer les «interventions non pharmaceutiques», ou NPIs en anglais, comme procédure de base face à toute nouvelle épidémie. Mais il aura fallu leur mise en oeuvre réelle, avec le Covid, pour constater in situ (hors certaines exceptions) leur inefficacité sanitaire et leurs effets désastreux sur tout le reste.

Confinement et société de contrôle.

On peut se tromper une fois, mais persister implique une volonté qui fait penser que ces mesures servent en réalité des objectifs de contrôle politique, que je résume ici par la mise en place de la société de contrôle, une société post-moderne caractérisée par l’état d’urgence permanent et l’intégration du syndrome de peur (donc, d’obéissance) dans l’intime de chaque individu.

C'est ce qu'analyse le philosophe Giorgio Agamben avec l’état d’exception permanent:

Giorgio Agamben défend l’idée que l’état d’exception tend à
devenir indiscernable de la situation «normale», reprenant
celle-ci des Thèses sur la philosophie de l’histoire de Benjamin.
De Michel Foucault, il reprend le thème de
la biopolitique développé dans le tome I de l’Histoire de la
sexualité, soit l’ambition, qui est celle du pouvoir contemporain,
d’intervenir jusque dans la vie biologique des individus (dans le
sens même de zoé, ou «vie nue») et de gérer les citoyens
comme de simples vivants. Ce faisant il établit une ligne de
continuité entre la conception de la politique des nazis et celle
de l’Occident contemporain, notamment dans Moyens sans fins,
où il analyse le camp comme «l’espace biopolitique le plus
absolu», dans la mesure où l’homme y essaie de réduire
l’homme à une pure «vie nue».
https://fr.wikipedia.org/wiki/Giorgio_Agamben

Un intime déjà colonisé par ce que Ivan Illich nommait l’iatrogénèse médicale, là où l’Humain passe du stade de sujet de la science médicale (il est soigné par la médecine) à celui de l’intégration au sein du système médical: il est défini par la médecine, rejoignant en cela le principe de la société de contrôle qui ne voit la vie que sous l’angle comptable: un système fermé ne peut trouver sa raison d’être ailleurs qu’en son propre sein. Le bien suprême dans un tel monde est la vie, la tâche première qui incombe aux hommes est de conserver et promouvoir la vie.

La crise actuelle découle donc d’un spectaculaire alignement des planètes: une nouvelle approche de la lutte contre les épidémies basée sur la «distanciation sociale», justifiée par des modèles purement quantitatifs issus de la perversion des institutions médicales décrite par Ivan Illich, qui se combine avec la mise en place d’une société de contrôle facilitée par l’omniprésence de la surveillance technologique.

Scientisme covidien et totalitarisme.

C’est en cela que le scientisme covidien sert de marchepied à un nouveau totalitarisme, illustré par les appels au passeport sanitaire, à l’obligation vaccinale même pour les personnes non à risque, à la délation et à la répression tous azimuts par les milices fascisantes désinformées par la propagande d’Etat. Un marchepied totalitaire illustré, également, par les salves de lois liberticides pondues par des régimes faibles afin de préserver leur autorité vacillante, par exemple la loi sécuritaire récemment votée en France par les larbins de la Macronie (12).

Le scientisme covidien a des effets néfastes allant bien au-delà de la «simple» perte de liberté et de la baisse de PIB: la fermeture des écoles relève, à mon avis, du crime organisé et impacte négativement les enfants, notamment les moins favorisés, et tout spécialement ceux de ces pays où ce sont les filles qui font les frais de l’accès limité à l’éducation (13). Et pour la Banque Mondiale, c’est de l’ordre de 150 millions de personnes qui basculent dans la pauvreté (14), pendant que les gouvernements s’en servent comme cheval de Troie sécuritaire:

Certains gouvernements d’Afrique du Nord, des Amériques ou du
Moyen-Orient ont adopté des mesures législatives érigeant en
infractions les commentaires concernant la pandémie et ensuite
poursuivi en justice des personnes accusées d’avoir diffusé de
fausses nouvelles ou de s’être opposées à des décisions
officielles. En Europe, des dirigeant·e·s ont confondu crise
sanitaire et préoccupations relatives à la sécurité nationale,
faisant adopter à la hâte des textes censés garantir cette
dernière ou renforçant (ou menaçant de renforcer) leurs
capacités de surveillance.
https://www.md-universal.eu/images/efeb0538-48b5-4c4c-8b81-a7545228c805_POL_10_3202_2021_AIR_ext_FR_FINAL_01_avril.pdf

Une situation encore accentuée par la problématique du dérèglement climatique et de la prédation néocapitaliste, ces derniers étant des cofacteurs dans l’apparition de nouvelles souches virales autant que dans l’envol des inégalités de par le monde.

Malgré tout cela, ici en France comme en Belgique le déconfinement reste conditionnel, et il y a encore pléthore de politiciens, technocrates et pseudo-médecins ou scientifiques pour continuer à «croire» aux mérites du confinement, du masque en extérieur, du couvre-feu, de la fermeture de la culture et des restaurants, etc… Et en effet, il s’agit bien d’une croyance quasi religieuse, d’un abandon de la rationalité au service d’un dogme scientiste où l’Humain n’est plus qu’une statistique, la maladie une courbe à aplatir et la démocratie, une vieille rengaine inefficace et dépassée.

 

Par Vincent Verschoore


(1) The Lancet, volume 385 du 11 avril 2015.
(2) https://journals.plos.org/plosmedicine/article?id=10.1371/journal.pmed.0020124
(3) https://www.linternaute.com/actualite/guide-vie-quotidienne/2489467-chloroquine-l-etude-de-the-lancet-sur-l-hydroxychloroquine-enterree/
(4) https://blogs.bmj.com/bmj/2021/01/04/peter-doshi-pfizer-and-modernas-95-effectivevaccines-we-need-more-details-and-the-raw-data/
(5) https://www.johnsnowmemo.com/
(6) https://gbdeclaration.org/la-declaration-de-great-barrington/
(7) https://www.sciencesetavenir.fr/sante/le-covid-19-peut-etre-transmis-par-l-airavertissent-des-experts-mondiaux_145787
(8) https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpubh.2020.604339/full
(9) https://youtu.be/9szCNNZrPK8
(10) https://www.aier.org/article/the-lockdown-paradigm-is-collapsing/?fbclid=IwAR3t6HvyeysabjcYlEsPVF27ndsMaNWVg1eYrWKLHPtFusj7NkHxidUB34
(11) https://www.nytimes.com/2020/04/22/us/politics/social-distancing-coronavirus.html
(12) https://www.midilibre.fr/2021/04/15/loi-securite-globale-ultime-vote-alassemblee-pour-un-texte-tres-controverse-9489152.php
(13) https://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2020/10/07/covid-19-to-add-as-many-as-150-million-extreme-poor-by-2021#:~:text=WASHINGTON%2C%207%20octobre
(14) Ibid.

Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que la responsabilité de l’auteur et ne représentent pas nécessairement celle de BAM!

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