Qui est, et qui n'est pas, digne d'être un expert scientifique ?

Santé
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"Selon M. Muraille, l’expertise scientifique serait définie par un seul critère, le nombre de publications dans des revues scientifiques avec comité de relecture. Non, au-delà de la dimension corporatiste du propos, il y a des failles dans ce raisonnement"

"Par le docteur Gaëtan Cantineau"

"Une énième carte blanche de M Éric Muraille est parue dans La Libre ("Le Parlement et les universités légitiment par leur silence des messages criminels") et m'a plongé dans un abîme de perplexité. Il y soutient, pour faire court, que l'expertise scientifique serait définie par un seul critère, le nombre de publications dans des revues scientifiques avec comité de relecture, les peer-reviews. Que par conséquent quiconque n'a pas récemment publié n'est pas digne d'être entendu comme expert. Il précise que la notion même d'expertise devrait être en quelque sorte verrouillée par les institutions scientifiques comme le FNRS… Curieuse et bien étroite conception de l'expertise. En effet, et c'est heureux, l'expertise peut s'acquérir de bien d'autres manières. L'expérience de terrain par exemple, ne peut être négligée, surtout dans des moments de crise. Mais au-delà de la dimension corporatiste du propos, il y a une faille énorme dans le raisonnement."

"Le Pr. Didier Raoult, le mauvais exemple"

"En effet, M Muraille s’autorise à citer le Pr Didier Raoult comme exemple de"mauvais expert" qui aurait un discours ne méritant pas d’être entendu. Il s’agit pourtant très exactement de la personne ayant les publications les plus solides du monde francophone. Fichtre, voilà qui met à mal le principe selon lequel les publications feraient nécessairement l’expert… D’autres scientifiques ostracisés appartiennent très exactement à cette même catégorie, il faut donc croire que ce n’est pas dans le volume des publications que se nicherait la légitimité."

"Quid des conflits d’intérêts d'experts avec l’industrie pharmaceutique
?"

"Bien entendu, quand on voit avec quelle facilité un travail frauduleux a été publié dans le Lancet pour discréditer l'hydroxychloroquine, on est en droit de douter de la probité desdites revues. Sans oublier que le rédacteur un chef du Lancet, , lui-même, a reconnu que "Une grande partie de la littérature scientifique, sans doute la moitié, pourrait être tout simplement fausse". Il faudrait s'interroger très sérieusement sur le rapport à la vérité et à la probité car c'est là que se situe véritablement la légitimité à s'exprimer en tant qu'expert. De ce point de vue, avant tout autre considération, l'indépendance du scientifique est primordiale. Il me semble que le tout premier critère de légitimité est l'absence totale de conflits d'intérêts. Il n'est pas admissibles que des personnes puissent s'exprimer, à plus forte raison en tant qu'experts, lorsqu'elles ont des relations privilégiées avec une tierce partie dans le débat. Les liens économiques, professionnels, d'amitié, que de très nombreux experts entretiennent avec l'industrie pharmaceutique sont inacceptables et pourtant monnaie courante. Il est remarquable que le Pr Raoult ne soit jamais cité pour des conflits d'intérêts mais que certains, parmi ses plus féroces opposants y trempent jusqu'au cou. Comment comprendre, en Belgique, que certains des experts, déjà à la manœuvre lors de l'épidémie H1N1 et qui avaient à l'époque été épinglés pour leurs conflits d'intérêts puissent avoir été retenus dans le groupe d'experts pour le Sars-CoV2
? A l'époque, alors que les liens entre lobbyistes et experts commençaient à être relevés, le président de la Commission santé du Conseil de l'Europe déclarait
: "Tout ce qui importait et tout ce qui a conduit à la formidable campagne de panique à laquelle on a assisté, c'est qu'elle constituait une occasion en or pour les représentants des labos qui savaient qu'ils toucheraient le gros lot en cas de proclamation de pandémie". Pourquoi les labos et leurs experts rémunérés auraient-ils changé depuis 2010
? Pourquoi ce qui avait choqué alors est-il acceptable aujourd'hui
?" 


"Une pré-publication foireuse de l’institut Pasteur"

"M Muraille regrette le recours aux pré-publications, diffusées dans les médias avant d’avoir été relues. Fort bien. Rappelons celle de l’institut Pasteur qui annonçait un taux de contamination 12 fois moindre pour les vaccinés. Cette pré-publication complètement foireuse a été reprise en boucle dans de très nombreux médias et citée par de très nombreux experts pour justifier certaines mesures "
sanitaires
" à l’encontre des non-vaccinés. Il ne me semble pas avoir entendu nos gardiens du temple s’indigner de ce travail honteux ni tancer les politiques, les médias et les scientifiques qui l’ont abondamment cité. Et puisque des études frauduleuses peuvent être publiées malgré la relecture par les pairs, les pré-publications sont-elles, par elles-mêmes, le nœud du problème
 ? Sans doute pas."

"Le consensus en sciences est un processus long et pas un prérequis
"

"Finalement, on retient des déclaration répétées de M Muraille que l’expertise scientifique devrait être le fruit d’un consensus, que les opinions divergentes ne seraient, in fine, tout simplement pas admissibles. Voilà qui est commode... Arrêtons de chercher l’expertise ailleurs que là où elle se place le plus opportunément
: du côté des opinions de M Muraille, au centre de l’opinion consensuelle. Voilà qui simplifie l’équation. Et au diable les règles élémentaires de l’épistémologie
! Plaçons le consensus en jalon initial de la réflexion scientifique plutôt que là où se trouve sa place réelle
: au bout du chemin de l’expérience et de la confrontation au réel. Le consensus scientifique n’est obtenu – normalement - qu’à l’issue d’un temps long, par la répétition des preuves et l’élimination progressive des alternatives. Fi de tout cela, le consensus sera dorénavant la première étape du raisonnement, et quiconque s’en écartera ne sera tout simplement pas autorisé à s’exprimer, et surtout pas en tant qu’expert. Avec ce genre de procédés, la terre serait toujours plate…"


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